Le Capitaine de Jong venait de sortir de sa cabine – sa nouvelle cabine, depuis qu'il avait embarqué sur son Chebec. Certes, la Corvette avait ses atouts, notamment la cabine spacieuse, mais Albert y avait perdu trop de ses amis pour pouvoir rester avec – il se souvenait bien de la 'grande tempête'. Son Second et son Quartier Maitre y avaient perdu la vie.
Certes, c'était dommage d'avoir perdu quelques canons, mais la rapidité du nouveau le compensait largement. C'était déjà quelques jours que le Vliegende Hollander, accompagnés d'autres capitaines de la Nieuw Nederland et Amsterdam chassait le Centaurus, du capitaine Juan Vador, un pirate intrépide ayant fait l'erreur d'entrer dans des eaux hollandaises.
Parfois le vent soufflait dans la bonne direction (comme toujours, à l'Ouest – bien évidemment il n'y a rien de nouveau là-dedans), parfois non, et les hommes étaient fatigués. Le capitaine était fatigué. Enfin, il rattrapait sa proie, ses amis non loin derrières (enfin ses amis et le pirate qui croyait être un Hollandais, chez la NN et la NA ça devenait ridicule). Alors que le temps pressait, il donnait l'ordre de lancer les grappins...
Il savait que sa proie aller se retourner, le mordre... Rien. Il préparait les hommes, s'assurait que chacun savait quoi faire, mais toujours rien chez le navire adverse. Finalement, alors que la tempête rageait, il fit passer l'ordre. Les sabres furent distribués, suivi de près par le rhum (infusés de gingembre et de lait de poulpe comme l'ordonnait toujours le capitaine de Jong – lui, n'en abusait pas comme certains de sa confrérie).
Il sentait la peur, l'appréhension chez ses hommes, chez lui-même. Alors qu'il ne pouvait plus entendre, il commençait le chant de guerre hollandais. Il travaillait encore dessus, parce que c'était pas le genre de chant qui ferait peur à un pirate aguerri. Le combat fut commencé, les pirates étaient là. Ce que le capitaine avait pris pour de l'inactivité était surtout dû au fait qu'il avait surestimé son adversaire. Alors qu'il s'attendait à une centaine d'opposants, à peine plus d'une cinquantaine se battait. Peu de temps après le début de la bataille, son (nouveau) Second le rejoignait, et annonçait la victoire.
A sa connaissance, c'était le premier Chebec abordé depuis des années, la preuve que la Hollande savait se défendre contre tous ses agresseurs, quels que soient leurs navires – du plus humble Senault au plus noble Chebec ou Frégate. La Nieuw Nederland et Amsterdam étaient là. Cette victoire, ce n'était pas une bataille isolé. C'était un pas en avant, un symbole que tous les néerlandais verraient, et qu'on raconterait aux petits-enfants. Enfin, c'était ce que le capitaine de Jong espérait.
Il avait cependant perdu des hommes... Heureusement aucun de ses amis, les officiers, mais tout de même, trente hommes... Il n'en avait pas perdu autant depuis le désastre de la Fraternidad, au cours duquel ces derniers se sont montrés de vaillants guerriers, et plus de la moitié de son équipage avait été décimé à cause de son arrogance. Il posait un doublon d'or dans la poche de chacun des décédés, et gardait de côté 5 piastres chacun, pour les veuves et les orphelins. Il rentrait dans sa cabine prier pour le salut de leurs âmes, son Second hurlant les ordres : ils rentraient.