L'arrivée du Métal Hurlant et de l'Endoloris à Saint Thomas s'était faite en pleine nuit de la saint sylvestre. L'équipage de Piotr Curtiss pourtant fourbus ne se laissa pas prier pour festoyer toute la nuit durant.
En vérité, à peine la passerelle de débarquement fut elle posée sur les quais de bambou que déjà le navire avait vomit ses soulards vers les tavernes.
Piotr posa les pieds sur les quais et aperçu un jeune enfant en haillons assis sur une bobine de câble de chanvre, jouant avec un rat bien gras apprivoisé.
-Hé gamin, ça te dirait un bon gueuleton que t'aurais pas besoin de ramasser au bas des pavés ? ?-Peuh ! D'ici demain les ruelles seront jonchés de débris les poches pleines de piastres ! J'aurais de quoi me payer du pain pour le mois, surtout si ce sont les marins du capitaine fou qui cuvent sur le pavé ! Le gosse releva la tête, et reconnut son interlocuteur ; ses yeux devinrent rond comme des soucoupes.
-C'est justement pour retrouver 20 de ces marins là que j'ai besoin d'un petit futé comme toi. Ils ont dû arriver peu de temps avant moi, à bord d'un navire à vendre. Mais dis moi, le gouverneur aurait il ordonné aux gardes côte d'ouvrir le feu sur quelque navire ?-Je sais vous dire ou sont vos hommes capitaine, quand au gouverneur et ses canonniers, ils sont tous occupés vider les stocks de vin et de rhum avant les douze coups de minuit.-Bon, je suppose que je devrais remettre mes affaires à demain alors. Mais pourquoi j'entends tonner des canons ?-C'est comme ça depuis plusieurs jours. On entend tirer le canon dans l'Ouest, mais personne ne sait de qui ni de quoi il s'agit capitaine ! Dites, vous me donner combien pour vous guider à vos hommes capitaine ? -Assez pour te payer des frusques et te fabriquer un chapiteau miniature pour y monter des spectacles avec ton rat. C'est quoi son nom ?-Je l'ai juste appelé "lera", suivez moi, je vais vous conduire à eux, ça fait des jours qu'ils sont à l'auberge en face de l'armateur. Ils ont vendu un navire en arrivant et ils n'ont pas mis les pieds dehors que pour pisser leurs trop plein de bière-de-St-Thomas !puis machinalement ajouta comme un automate
-"la bière de st thomas, on n'en boit tant qu'on y voit !"Piotr retrouva ses marins dans de sales état, et préféra attendre la fin des festivités pour procéder au partage du butin, et préparer le Métal Hurlant à affronter ses premiers jours de cette nouvelle année en mer.
Lorsqu'ils furent prêts et presque sobres, Piotr ordonna d'appareiller.
La vigie se mit à braire :
-Voiles en vue capitaine !-Laisse moi deviner, des voiles Françaises au large de Sainte Croix ?-C'est cela capitaine ! Une corvette de 6, et un senault armé en course sont sorti du port !-Donnez de la voile, j'en ai assez des grenouilles, ne restons pas là, on a du chemin à faireC'est alors que le gosse et son rat apparut courant sur les quais, agitant un parchemin en l'air
-Hola arrêtez le navire du fou ! J'ai un pli à lui remettre !Piotr demanda de remonter les voiles et l'équipage ne savait déjà plus quel ordre exécuter : donner toutes les voiles ou les remonter ?
Après 10 bonnes minutes de zizanie, une bagarre générale parmi les gabiers et un marin à la mer, ils envoyèrent une chaloupe chercher la missive.
- Andrea Potter a écrit:
Piotr,
je viens de recevoir une étrange demande de mercenariat pour les Marchombres du gouverneur d'Aruba. Nous devons porter secours à un insignifiant navire marchand en perdition à quelque miles à l'Ouest d'ici. Le Muideberg. Cette mission de sauvetage nous rapporterait la bagatelle de 100 000 piastres. Une telle somme pour un navire si discret, ça pue l'embrouille à plein nez. J'aimerais bien savoir ce que trafique ce capitaine Hollandais si près de Sainte Croix. Hâte toi d'y aller, l'Endoloris n'est pas tout à fait prêt. Je te rejoins dès que possible. On en saura plus une fois sur place.
Bien à toi,
Andréa Potter
Piotr ordonna à nouveau de donner toute la voile et les gabiers de râler qu'ils allaient tous devenir aussi malades que le capitaine.
Le Métal Hurlant suivait le vent et dépassa bientôt un ilot bien fourni en arbres exotiques. Les bruits de canons n'avaient fait qu’amplifier au détour de l'ile, et tout l'équipage assista à une vision de carnage. Des débris de bois si nombreux flottaient devant eux qu'on aurait pu y marcher sans se mouiller les orteils.
Et la vigie de hurler :
-Capitaine ! épaves en vue !-Quelles sont les couleurs ?-Je crois que c'est un navire Hollandais ou ce qu'il en reste, ainsi qu'une frégate légère Française. Je ne saurais dire qui gagne la bataille capitaine ! Il y a autant de mort à bord que de bois autour !-Préparez vous à l'abordage ! Il n'y a pas de temps à perdre !-Vous devez être content capitaine, vous allez enfin pouvoir vous en prendre autre chose que des français ?-Approchez la frégate bande d'idiots ! Pas le navire hollandais !L'assaut fut bref, aucun homme pour manœuvrer, le santa Hildiko III ne chercha même pas à éviter l'approche du Métal Hurlant, et les pirates montèrent sur un pont déjà vide.
Piotr devant, il se précipitèrent dans les soutes à canons. L'explosion d'un canon trop chaud envoya 11 pirates saluer satan, et les 35 derniers marins à bord de la frégate légère Française vendirent chèrement leurs peaux avant leurs dernier voyage.
Rassasié de sang, Piotr laissa ses gars parcourir le navire à la recherche de quelques richesses, et remonta sur le pont avec le jeune Aziz.
-Aziz, à toi l'honneur, hisse le drapeau des Marchombres en haut de ce mat, que les Hollandais cessent le feu.Il salua le capitaine de la barque Longue qui éloignait déjà son rafiot du navire capturé.
Un pirate interpella Piotr :
-Capitaine ! Nous ne trouvons pas le capitaine Sebastien !-Peu m'importe la tête de ce Français, le Muiderberg est sauf. C'est tout ce qui compte.
Aziz, hisse aussi le drapeau des parlementaires ! Je veux en savoir plus sur ce capitaine !-Ils ont déjà mis une chaloupe à la mer Piotr ! Ils arrivent ! -L'heure de la paie a encore sonné les gars !!!